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Episode 4 : Langage « Bullshit » dans le recrutement !
Bonjour et bienvenue à tous pour ce nouvel épisode du Podcast, « Réflexions d’un humain humoriste ».
Un épisode à propos du langage professionnel, et plus particulièrement de celui du recrutement, recrutement qui désormais a pris des allures de chasse au trésor ou de ruée vers l’or.
Vous allez comprendre.
J’ai découvert récemment que, désormais, il ne s’agit plus pour les recruteurs de recruter des humains, nooon, mais d’attirer des talents.
Attirer des talents ? Comme c’est étrange !
A une époque, pour obtenir un boulot, il suffisait d’être un peu compétent, relativement sociable et un minimum professionnel.
Maintenant, non, on met la barre plus haut : il faut être un talent. Oui, parce qu’il n’est même plus question d’AVOIR du talent. Déjà, avoir du talent, c’est 3 bars de pression mais là, non, il faut l’être, l’incarner, le transpirer de tous ses pores.
« Oui, je suis conducteur d’engin de travaux, avec 3 mois d’expérience, et je transpire… le talent, je suis un TALENT, non mieux : je suis LE Talent. »
Alleluiah !
Alors, les plus chafouins me diront : « Oui, mais c’est une expression, juste comme ça, ce n’est pas littéral, tu joues avec les mots ! ».
Je joue pas : je veux comprendre de quoi qu’est-ce qu’on parle. Hé oui, si ce n’est pas littéral, de quoi parle-t’on quand on dit « Attirer les talents » ?
Si c’est pour dire « Embaucher du monde ». Y a qu’à dire çà. Mais c’est tellement plus sexy d’utiliser une terme vide qui enjolive, un concept complètement bullshit version « Deviens le héros de ta vie ».
Euh, donc je me dis qu’être un TALENT, ça va sévèrement limiter le nombre de candidats. Ben c’est vrai, j’imagine les gens sans emploi qui se disent : « Je connais un peu Excel, est-ce que je suis un talent ? Je sais passer le balais et laver les vitres, est-ce que je suis un talent ? »
Jacques Brel disait que le talent n’existe pas. Seule l’envie existe. Hè bè, quand on voit les chiffres qui présentent le % d’employés réellement motivés au travail, on comprend qu’ils aient du mal à en trouver, des talents, les recruteurs.
C’est pour ça que lorsqu’ils échouent à trouver des talents, ils changent de braquet : ils se mettent à chercher des pépites. Oui, des pépites.
D’ailleurs, ils ne cherchent pas des pépites. Non, ils les sourcent (de l’anglais « Sourcing », un terme anglais, c’est toujours bien pour se la péter). Ça devient des sourciers. Ils ont un bâton de sourcier, là et ils arpentent les allées des salons pour l’emploi genre Metierama, « pépites, pépites, pitititiititi ».
Ah, ça les esquinte, les pauvres.
Alors, heureusement hein, il leur arrive parfois d’en trouver, des pépites.
On parle là de gens qui acceptent de venir à l’heure au travail, qui savent lire, écrire, compter et dire bonjour, hein. Donc les candidats, finissent par le croire, qu’ils sont des pépites et donc qu’ils valent de l’or. Ah ouais, ça, ils se prennent pas pour des petites de tungstène, nos candidats.
Ils ont aussi leurs petites exigences. Des exigences de pépites. Désormais, ils ne cherchent plus un emploi. Non, ils recherchent une expérience professionnelle épanouissante, dans une entreprise éco-responsable, où ils se sentiront reconnus pour leurs valeurs, en travaillant sur des projets innovants à forte valeur ajoutée, et où ils seront rémunérés à leur juste valeur, sans encourager pour autant la société de consommation, afin d’atteindre un véritable équilibre vie pro – vie perso.
C’est vrai que c’est très équilibré comme projet. On est pas du tout dans l’exagération.
Finalement, les recruteurs sont déçus, parce qu’ils rêvent de candidat qui sont des super-héros, les candidats eux, sont déçus parce qu’ils rêvent du monde de Narnia. Et au final, tout le monde se passe à côté, dans un monde fantasmé complètement conceptuel.
Dans le prochain épisode, nous verrons que le langage bullshit est partout dans notre société notamment au travers de l’expression « Belle journée à vous ».
A bientôt.